M. Benvenutti
Dernière mise à jour: 2 novembre 2004

 

 



Maurice Benvenutti fut entendu, comme témoin, par l'inspecteur Porte le 11 juin 1974, à qui il déclara:



Je connais effectivement le nommé Ranucci Christian que je reconnais formellement sur la photographie anthropométrique n° 6645 que vous me présentez. J'ai effectué mon service militaire à Wittlich, en Allemagne, d'avril 1973 à fin mars 1974.
j'ai connu Ranucci à la caserne de la ville précitée car il est de la même classe que moi et il a effectué son service au même régiment c'est-à-dire au 8e Groupe de Chasseurs Mécanisés.
Nous avions en Allemagne peu de loisirs. Je suis allé plusieurs fois "boire un coup" en compagnie de Ranucci Christian au foyer de garnison, à l'extérieur de la caserne. Ce foyer est le seul endroit où je me suis rendu avec Ranucci. Il y avait des dancings à Wittlich, mais je n'y suis jamais allé car je n'aime pas danser. Je ne sais pas si Ranucci y allait, ni s'il "flirtait" des jeunes filles. Ranucci ne m'a jamais fait de confidences. J'ignore tout donc de ses goûts et de ses habitudes. Il faut dire aussi que pendant notre période militaire, il a été malade assez longtemps, c'est-à-dire pendant quatre ou cinq mois environ et nous n'avons toujours échangé que des paroles banales.

- Saviez-vous que vos nom, prénom et adresse étaient mentionnés sur un carnet de Ranucci?
Non, je l'ignorais. Je ne me souviens même pas lui avoir indiqué mon adresse de Marseille. Il n'est jamais venu me voir dans ma ville natale. Ainsi que je vous l'ai déjà précisé, mes seules sorties avec Ranucci ont été celles où nous sommes allés ensemble au foyer de Wittlich.

- Comment considériez-vous Ranucci?
Comme un camarade de régiment parmi tant d'autres. Je crois qu'il était assez fainéant et il n'était pas militariste. Je sais qu'il a été puni assez souvent pour des actes d'indiscipline. Je ne puis rien vous dire d'autre sur lui. Aucune amitié ne nous a liés.

- Avez-vous été surpris du crime commis par Ranucci?
Oui, j'ai appris par la presse et par la radio les faits reprochés à Ranucci. J'ai été surpris car franchement il m'a paru toujours parfaitement équilibré et je n'aurais jamais cru qu'il soit capable d'enlever une fillette et de la tuer.
J'ai connu en effet suffisamment Ranucci pour penser de lui qu'il avait tous ses esprits. Il a toujours raisonné normalement. Je vous ai dit que j'ignorais s'il flirtait des jeunes filles, car il ne m'a jamais parlé de relations avec des filles et je ne l'ai, quant à moi, jamais vu en compagnie de femmes...

- Etiez-vous au courant que Ranucci possédait une espèce de fouet, qui est en fait un assemblage de lanières de cuir avec à l'extrémité un élastique permettant de tenir cet objet au poignet, et pouvant éventuellement servir à des actes de flagellation?
Non, je n'ai jamais vu en possession de Ranucci un tel objet. Il ne m'a jamais parlé qu'il détenait un objet pareil.

- Etiez-vous équipé de lacets en cuir?
Non, nous n'avions pas de lacets en cuir; je n'en ai d'ailleurs jamais vu à la caserne.

- Pensez-vous pouvoir faire une déclaration présentant un intérêt pour cette affaire et notamment concernant Ranucci?
Non, je répète que je suis sidéré car je considérais Ranucci comme un être sensé. C'est tout ce que je puis vous dire.


Les relations entre Christian Ranucci et Maurice Benvenutti s'étaient donc limitées à une camaraderie de circonstance. A tel point que le témoin s'étonna que Ranucci eût possédé son adresse marseillaise. D'autant qu'il ne résidait plus à cet endroit mais dans les Hauts-de-Seine, ce que Ranucci semblait ignorer.

Pourquoi dès lors ce dernier a-t-il évoqué une visite chez quelqu'un qu'il connaissait à peine et à une adresse obsolète?
Cette visite n'a en tout cas été mentionnée pour la première fois que lors des aveux, mais jamais au cours des premiers interrogatoires de garde à vue.

On pourrait donc en conclure que les policiers, qui avaient découvert l'adresse dans le carnet de Ranucci, avaient besoin de s'en servir comme justification de sa présence à Marseille le 3 juin 1974.

L'évocation du "fouet" découvert dans la Peugeot et sa description pour le moins alambiquée sont également intéressantes. Les policiers voulaient en effet à tout prix faire passer ce scoubidou pour un objet à caractère sexuel justifiant les penchants pervers de l'inculpé. Ce qu'ils ne purent d'ailleurs jamais faire.

On relèvera enfin le goût très prononcé de l'inspecteur Porte pour les respect de la présomption d'innocence lorsqu'il interrogea le témoin sur le crime "commis" par Ranucci.



   
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