Pour finir, je pense qu'il est utile que je vous explique ce qui s'est passé pour l'affaire Daniel Massé.
Quand nous sommes entrés en contact avec son fils Yannick Massé - nous étions plusieurs du forum ici présent- , celui-ci avait créé un site internet :
http://www.presume-coupable.com.
La première chose qu'il nous a dite, c'est qu'il avait été contacté par Roland Agret qui lui proposait de lui fournir les statuts d'un comité de soutien à créer contre une somme d'argent, on va dire assez rondelette.
Nous lui avons donc dit :
- créer un comité de soutien, c'est gratuit et pour ce qui concerne les statuts, nous lui en fournirions le modèle convenable contre zéro euro. Et donc le Comité de soutien a été créé pour pas un centime.
- il faut déposer une requête en révision, mais vu le système tel qu'il fonctionne, il faut reprendre le dossier et l'étudier SANS AVOCAT. Oui, on en est là, ce n'est pas la peine de s'encombrer trop vite d'un "référent" à la mode tchécoslovaque 1952.
Et nous lui disons qu'il faut aller très loin, c'est-à-dire rédiger une armature de tous les arguments à faire valoir d'où découlera une requête en révision qui sera sans faille et à laquelle la commission de révision ne pourra pas répondre qu'elle rejette. Donc reprendre toutes les violations des droits durant la procédure - et ils étaient nombreux - reprendre toutes les charges et les démonter, et présenter les faits nouveaux comme un tout indissociable qui mène à la conclusion qu'on ne peut pas faire autrement que de réviser.
Au bout de quelques mois, aidés de conseils juridiques qui ne sont pas avocats, nous avons un "mémoire" de 250 pages qui reprend tout.
Et là, on commet une erreur. On propose à Yannick que son père puisse bénéficier tout de même des services d'un avocat, pour notamment médiatiser l'affaire et lui donner un certain retentissement et, à partir du document très précis et très argumenté, déposer une requête en révision.
L'avocat que M. Massé prend est une pointure sur la place de Paris et les requêtes en révision, il connaît.
Il commence par demander 12000 euros hors taxes de provisions. Bon on parvient à réunir cette somme plus la TVA à 19,6 %, ce qui fait plus de 14000 euros à lui verser. Et tant qu'il n'a pas reçu toute cette provision, il ne fait rien.
On lui demande un conseil juridique sur la valeur d'une constatation d'huissier comme fait nouveau, il ne répond pas.
Cela dure 7 mois comme cela, il n'est plus question de prévenir les médias et il envoie toujours la même lettre quand on le relance : quand j'aurai bien avancé, j'irai vous voir au centre de détention etc... Inutile de vous dire qu'il ne demande pas de permis pour pénétrer dans ledit centre de détention. Et qu'il ne se déplacera jamais.
M. Massé, qui finit par se lasser, lui donne une date limite : tout est préparé, il n'a qu'à reprendre tout ce qui a été rédigé. Et il ne fait rien... Le ténor a perdu sa voix.
Date limite, l'avocat se dit tout de même, il faut faire quelque chose, et donc il ressort le constat d'huissier pour lequel il ne répondait pas sept mois auparavant malgré les demandes de conseil juridique et il nous dit qu'il en a besoin, sinon, il ne peut pas rédiger quoi que ce soit.
Donc on cherche un huissier, mais soudain il nous rajoute une autre chose qu'il voudrait, une constatation sur la poudre à pétards. Mais on ne comprend pas bien pourquoi car selon nous, cette constatation n'est pas à même de constituer un fait nouveau ou inconnu de la juridiction au jour du procès. Nous lui signalons le problème - il ne répond pas.
Mais bon, à tout hasard, nous joignons la constatations sur les pétards... Et soudain, encore changement, il ne faut plus un huissier, mais un expert, qu'il faut que M. Massé trouve lui-même, voilà ce que propose cette fois ce brave auxiliaire de justice.
Tiens tiens, un expert... L'expertise va prendre des semaines, voire des mois et coûter bonbon. Or pour nous, cela ne sert à rien, puisqu'il s'agit juste de vérifier que des bouteilles rentrent bien dans une caisse, ce qui démontre que l'expert désigné par le juge d'instruction a menti.
Entretemps, Yannick Massé indique le vendredi à cet avocat les coordonnées de l'huissier que nous avons choisi et qui veut bien faire la constatation.
Or le lundi, coup de théâtre, l'huissier se rétracte, il ne veut plus faire les constations et dit laconiquement à Yannick Massé : je ne suis pas qualifié, contactez un expert.
Pile ce que veut l'avocat. Tiens donc.
Donc, on se pose des questions et cet avocat laisse la désagréable impression de n'avoir qu'un seul rôle : retarder de toutes les façons possible le dépôt d'une requête en révision.
Et donc voici comment la requête en révision a été présentée sans avocat - M. Massé s'est séparé de lui comme vous vous en doutez - , à partir du travail fait par le comité de soutien et les conseils non avocats ou conseils étrangers, requête qui était très bien puisque la commission de révision s'est trouvée dans l'incapacité totale de la démolir et a refusé de donner la moindre argumentation et le moindre motif à son refus, ce qui est une violation flagrante de la loi sur la révision qui parle d'une "décision motivée".
Et cela, devant la CEDH, cela ne peut pas passer...
On a essayé de récupérer une partie de l'argent et le représentant du bâtonnier a réduit les honoraires de 12000 à 4000 euros, estomaqué notamment qu'un avocat puisse ne pas s'être déplacé pour voir son client détenu. Mais le ténor a fait appel et la cour d'appel a décidé que, même si le travail n'est pas fait, c'est la "difficulté de l'affaire" qui compte et donc on lui doit bien 12 000 euros pour la dizaine de lettres dans laquelle l'avocat précise "qu'il est en train d'étudier de le dossier et qu'il viendra voir M. Massé bientôt", ce qui est évidemment très utile aux intérêts de M. Massé.
Précision, la cour d'appel de Paris est deux couloirs à côté de la cour de cassation qui sans doute n'est pas contente qu'on saisisse la CEDH sur le fait qu'elle ne respecte pas la loi. Ils n'étaient pas habitués à ce qu'on les embête ces gens là...
Voilà qui vous éclairera peut-être sur le système tel qu'il fonctionne.
Comme disait Olivier Guichard : "
Je n'ai appris qu'une seule chose au Ministère de la justice, c'est qu'il ne faut jamais avoir à faire avec la justice."
Il voulait dire l'administration judiciaire.