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Mais ce plan n'a pa été fait d'une seule traite.
Ah non, sinon on aurait dit : "Mais c'est n'importe quoi! Comment peut-on dessiner d'une seule traite un endroit que l'on a vu que furtivement ? Ce n'est pas possible, le plan a été dessiné à l'avance...".
Non on aurait dit qu'il y avait une cohérence dans le plan qui là ne saute pas véritablement aux yeux.
D'ailleurs il serait fort intéressant de comparer le plan, tel qu'il est conçu avec les aveux.
Vous me direz, c'est difficile, parce que les aveux déjà sont complètement absurdes, mais faisons un effort et regardons plus attentivement ce qui est dit et comment cela se traduit dans le dessin qui nous est proposé, d'autant que les aveux nous indiquent à quel moment le plan a été réalisé :
"Je suis arrivé à Marseille et j'ai pensé retrouver un camarade de l'armée qui se nomme Benvenutti et qui demeure avenus Alphonse Daudet, n°51."
C'est dans le carnet de Ranucci que les policiers ont trouvé cette adresse et c'est pour cette raison qu'ils sont capables de faire dire à Ranucci exactement son numéro. Mais chose étrange,Ranucci ne cherche pas la rue Daudet et se gare devant la cité Sainte-Agnès, de l'autre côté du boulevard et à un kilomètre de là, donc de deux choses l'une, soit il est complètement crétin et il ne sait pas demander son chemin aux passants, soit c'est sa myopie qui a gêné, mais il y a déjà un problème.
"Sans trop connaître Marseille, j'ai donc garé mon véhicule et je pensais aller me promener à pied. À un moment j'ai remarqué deux enfants jeunes qui jouaient devant une cité. Je ne me souviens pas exactement de l'endroit."
Donc là il serait capable de dessiner la cité : donc des immeubles, de façon très imprécise, alors va pour le rectangle, la mention IMMEUBLES et la mention RUE, là où il se gare. Mais au fait, de quoi peut-il se souvenir s'il ne "se souvient pas exactement de l'endroit" ?
"Je peux seulement vous dire que cette rue était assez étroite et qu'elle n'était pas bordée d'arbres."
Cela ne correspond pas du tout à l'endroit, puisqu'il est censé se garer, non pas dans une rue mais à l'intersection de la rue Albe et de l'impasse Albe. Il est aussi curieux qu'il ne se souvienne pas du rond-point Claudie Darcy puisqu'on ne voit que lui quand on se gare à cette intersection.
Ceci dit, peut-être qu'à l'époque le rond point n'existait pas, mais j'en doute puisqu'à cet endroit se rejoignent la rue Vincent, la rue Albe deux fois, la rue de chez pas quoi et bien sûr la sortie et l'entrée de la rocade du Jarret, d'où la nécessité du rond-point. Or quand on ne connaît pas un endroit, les ronds-points c'est terrible parce qu'on ne sait pas quoi choisir, et là il ne sait vraiment pas puisqu'il se gare du mauvais côté de la rocade. Quel con !
Pas bordée d'arbres ? on ne sait pas car s'il parle de la rue Albe, il y a le fameux platane. Donc pas d'arbres ? Même de l'autre côté, celui de l'impasse Albe, il a des espèce de buissons. C'est vraiment imprécis comme description et ça ne correspond pas.
Pour l'instant : à part les IMMEUBLES (en étant très gentil) et la RUE dont on ne sait s'il s'agit de la rue Albe ou de l'impasse, on ne voit pas ce qui peut motiver le plan, mais bon...
Donc les enfants sont là quand il se gare, continuons :
Après avoir regardé ces enfants pendant quelques minutes, jeles ai abordés. J'avais garé mon véhicule mon véhicule à dix mètres de l'endroit où jouaient ces enfants.
Ce qui est curieux, c'est que tout d'un coup, la mémoire lui revient sans doute, les policiers ont dû être persuasifs, je ne sais pas, et il se souvient que les enfants sont à dix mètres. Donc de deux choses l'une, considérant où se trouve la voiture, où ils sont de l'autre côté de l'impasse Albe, où ils sont sous le platane, ou bien dernière solution, ils sont de l'autre côté de la rue Albe, du côté qui fait genre terrain vague avec quelques herbes folles.
Mais de tout cela aucun souvenir, en revanche, il se souvient qu'ils sont à dix mètres. Bon, va pour dix mètres. Mais pour l'instant rien qui motive un seul rajout sur le plan, on est sur la planète Mars avec une rue qui est étroite et qui n'est pas bordée d'arbres. Ce qui encore une fois ne correspond pas du tout à l'endroit : une intersection pas large mais assez ouverte...
Continuons :
"Il y avait un petit garçon auquel j'ai donné cinq ou six ans, qui avait les cheveux courts. [il avait des yeux ? une bouche ? deux jambes une tête ?] Il y avait également une petite fille qui semblait un peu plus âgée, peut-être sept ou huit ans. Elle était vêtue de clair : un pull-over et un "pantalon court". [tiens voilà un polo qui se transforme en pull, il me semble avoir vu cela quelque part, heu un "pantalon court" en français cela s'appelle un short, si je faisais du sophisme je dirais : vous voyez ce n'est pas Marie-Dolorès, car Marie-Dolorès avait un short et Ranucci dit un "pantalon court" donc cela n'a rien à voir...]
Je me suis approché de ces enfants et je leur ai demandé s'ils avaient vu une bête. Je ne me souviens pas très bien des termes que j'ai employés et je pense qu'il s'agissait de chien ou de chat."
Le pauvre Jules Porte qui tape ces aveux tout droit taillés dans le zinc de la vieille montagne et bruts de décoffrage ne se rend peut-être pas compte qu'il est en train de transformer la malheureuse victime en débile profonde. Le Ranucci dit qu'il a vu "une bête" et elle accepte de monter dans la voiture ? Comment se fait-il ? Ranucci a sûrement un charme fou mais enfin, une gamine de huit ans, c'est curieux... On dit à la gamine j'ai vu une bête ? Bon ben vous montez.
"Le petit garçon est reparti de son côté pour rechercher la bête. Je suis resté sur les lieux en compagnie de la fille.
Les souvenirs me reviennent et je suis en mesure de vous dessiner le plan des lieux. Je m'exécute."
Donc c'est un vrai miracle, tout d'un coup, Ranucci voit ses souvenirs revenir - à moins que ce ne soient les policiers qui ont fait un effort de leur côté de simple cohérence et pour faire noter les petits détails en minuscule. Donc tout d'un coup apparaissent : la rue qui monte, l'autre rue, la murette, la place de la voiture et le sens du départ de l'enfant.
Et Ranucci va commenter son chef-d'oeuvre en péril :
"Comme vous pouvez le constater sur ce plan que je viens de vous dessiner de ma main, les enfants jouaient sur un trottoir qui longeait une rue en pente."
Voilà que maintenant Ranucci s'est rappelé que la rue était en pente, il croyait sans doute avant que la rue était plate. Vous me direz, on a longtemps cru que la terre était plate. Donc les enfants jouaient dans l'herbe. De l'autre côté de la rue.
" J'avais garé ma voiture au bas de cette pente, devant un immeuble situé à gauche, en bas de la rue."
Ah, donc, tout ce qu'il y a avant est faux, Ranucci ne s'est pas garé dans une rue "étroite et non bordée d'arbres", il s'est garé sur une petite place, devant un immeuble, si on suit le dessin qu'il vient d'exécuter (mot fâcheux). Et avant il ne s'en souvenait pas ? C'est idiot.
Mais si on réfléchit : en bas de la rue, devant l'immeuble : c'est de l'autre côté de la murette. Pas là où la voiture est dessinée. Le plan est faux, il est contredit par ce que disent les aveux. Ou alors il est fort imprécis.
Il ne colle pas.
"Les enfants étaient sur le trottoir en face de l'immeuble. À cet endroit, la rue forme un léger virage. Le petit garçon est parti en direction du haut de la rue pour rechercher un animal. J'ai alors discuté quelques instants avec la petite fille et elle est montée sans difficultés dans la voiture."
Quel délire ces aveux, c'est confondant de sottise. Donc le garçon part chercher un animal... Ah quel animal ! Ben ce n'est pas ce que raconte Jean Rambla, Jean Rambla dit que l'homme lui a annoncé qu'il avait perdu son chien noir et il lui a demandé de le chercher, ce n'est pas Jean Rambla qui est parti chercher de sa propre initiative "un animal"... Pour la gamine ça semble devoir être pire mais examinons la suite.
"Je vous précise que lorsque le petit garçon est parti rechercher l'animal, nous nous trouvions tous les trois à hauteur de ma voiture et sur le même trottoir. Quand nous fûmes seuls, la petite et moi, je lui ai proposé de monter en voiture pour aller nous promener. J'ai formulé cette offre à deux reprises car, la première fois elle a hésité. Finalement, elle a accepté. Je suis monté le premier dans la voiture, je lui ai rabattu le siège avant et la petite a pris place à l'arrière. Je précise que la porte côté conducteur est bloquée, ce qui m'a obligé à monter moi-même par le côté passager. Je me trompe, la porte n'était pas bloquée à ce moment là, je suis monté par le côté gauche. C'est seulement après l'accident que la portière gauche a été bloquée."
Quand on relit de telles choses, on ne pense qu'à un seul qualificatif : grotesque, la police marseillaise dans cette affaire est proprement grotesque. Le plan est grotesque, mais les aveux plus encore sont grotesques.
Bien entendu les policiers qui ont vu la voiture ont constaté que la portière conducteur ne s'ouvrait plus et qu'on était obligé de passer par le côté passager pour entrer. Mais ces pauvres gens ne se souviennent même plus qu'il y a eu un accident qui a provoqué cela. Donc ils font dire à Ranucci que la portière est bloquée au mauvais moment - comme dirait Gérard Bouladou, ils n'étaient pas en forme, le problème c'est qu'on se demande quand ils le sont, parce que visiblement, ils ne le sont pas souvent, en forme. Mais cela prouve deux choses : un que l'accident a bel et bien bloqué la portière conducteur : le témoignage Aubert à partir du 6 : poubelle, et deux que la scène n'est pas revécue par Ranucci. C'est un montage, mais ce n'est pas vécu.
Les aveux confirment que la voiture n'est pas à sa place sur le plan et l'insistance qu'on a mis à dessiner une murette dont les aveux ne disent curieusement strictement rien renforce cette impression : les enfants donc ont traversé la rue mais ils n'ont pas contourné la murette, la voiture est donc plus bas et plus proche de l'impasse Albe. Le plan est donc faux.
Quant à la gamine qui part soit disant en promenade, nous savons bien qu'il n'en est rien : elle part pourquoi ? Bien évidemment pour chercher le chien.
Et quand on sera sur la rocade, elle se rendra compte qu'on ne cherche plus le chien et ça ne l'inquiéterait pas ? Les aveux de Ranucci ne correspondent ni au plan véritablement, ni aux autres témoignages. En cela ils sont nuls et non avenus.
Quand on pense que c'est sur de telles choses qu'on l'a décapité, ben on se dit, comme Louise Michel, la République, comme c'était beau sous l'Empire.