Du temps de la guillotine(21/05/2008)
Me Paul Lombard, le doyen des avocats, démonte le couple assassin
Envoyé spécial en France Philippe Boudart
CHARLEVILLE "Décidément, je ne changerai jamais. Voici 50 ans, je plaidais pour la première fois devant une cour d'assises."
Hier, comme il l'avait annoncé, Me Paul Lombard, 81 ans, a saisi le micro. Avec brio. Pour Francis Brichet. "Je suis l'avocat de la mémoire, du souvenir. Alors, je vais vous parler avec le langage du coeur ."
Vif, percutant, accrocheur, le ténor détonne : "À l'époque où la justice française tuait comme vous, Fourniret, vous m'entendez ?, elle tuait pour protéger, la justice. Qu'est-ce qu'il se serait passé si l'année 1981 n'avait pas écarté la guillotine ?"
Silence pesant. Chape de plomb. L'avocat pivote sur ses talons et défie Fourniret du regard : "Cette petite, qui ne touchait presque pas le sol, qui marchait comme une danseuse, vous l'avez jetée dans le congélateur avant de l'enfouir dans un trou".
Me Lombard dénonce un couple assassin. "Et c'est rarissime. Alors, à culpabilité identique, il doit y avoir un verdict identique. N'accordez aucune circonstance atténuante, ni à Fourniret, ni à Olivier".
Les accusés ont chacun un descriptif pour Elisabeth : "Une danseuse, une silhouette pleine de grâce, une belle petite fille blonde, elle portait un chignon ou une queue-de-cheval comme une petite fille qui va à la danse..." Me Lombard fulmine : "Dans la mise à mort, le rôle du bourreau est égal à celui de l'aide-bourreau" . Pour enlever Elisabeth, "le couple use d'un stratagème dégueulasse, poursuit l'avocat. J'utilise volontairement ce mot pour sa bassesse. Elisabeth n'entre pas dans une camionnette de ravisseur, elle entre dans une voiture de nurserie" .
Et le bourreau annonce l'heure de la mise à mort : "Le voyage est fini" . Me Lombard : "Je n'ai jamais entendu cela, jamais" . Fourniret prend un sac pour la tuer... lentement. Cela ne marche pas. Elle lui dit : "Mais monsieur, vous allez m'étouffer". Alors, il enlève le sac et il l'étrangle. Me Lombard s'indigne : "Comment avez-vous pu faire ça, comment ? Nous sommes au coeur du ruban noir de l'horreur. Et Olivier effectue la toilette intime de la petite. Vous, là-bas, vous Olivier, vous avez nettoyé le sang de la bile pour faire place au sang de la mort".
Trois fois, Elisabeth supplie Olivier de l'aider. "Quel romancier pourrait imaginer une telle horreur ?" Et il ajoute : "Il jouit soit du martyre des petites filles, soit du geste de donner la mort. Peu importe, on ne fait pas passer l'abominable avant l'horrible" .
Ph. Bt.
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