Moi je veux bien, mais le problème dans ce cas, c'est que ce qu'elle raconterait aux journaliste contredit ce qu'elle va dire aux policiers. Alors de deux choses l'une :
-ou, version journaliste, la gamine est arrachée de la portière, ce qui serait ma foi, plus logique, compte tenu de la terreur de cette enfant. de se retrouver dans ce désert
-ou, version déposition à l'évêché, la gamine suit Ranucci de son plein gré en demandant - "d'une voix fluette et pas effrayée" s'il vous plait - : "où va-t-on ?"
Soit c'est ce qu'elle dit aux journalistes qui serait vrai, soit c'est ce qu'elle dit à la police. On choisit quoi finalement ?
De toute façon, la scène est impossible puisque les services techniques de la police ont déterminé que la portière était bloquée par l'accident. Donc Ranucci est obligatoirement sorti par le côté passager, donc il n'a pas pu tirer la gamine, elle était déjà sortie.
A moins qu'elle ne se fut trouvée à l'arrière, ce qui lui permettait de descendre le premier.
Ah oui, mais dans les aveux, lors de cet incroyable arrêt clope, Ranucci avoue bien gentiment que la gamine qui était à l'arrière est passée à l'avant. Pourquoi ? on ne sait pas trop, mais bon, elle est donc censée être à l'avant.
Donc si on suit les aveux, la gamine est à l'avant et la portière est bloquée, donc Ranucci ne peut pas sortir par la portière conducteur mais par la portière passager, donc la gamine est déjà sortie.
Ce qui serait d'ailleurs plus logique puisque l'on sait qu'elle perd sa chaussure. Elle perd sa chaussure parce qu'elle s'enfuit.
Donc cette version est plus en rapport avec les constatations : elle sort d'abord, elle s'enfuit, ne voit pas le fossé, se tord plus ou moins la cheville et perd sa chaussure, du coup Ranucci qui est sorti par le côté passager la rattrape.
Oui mais ce que dit Mme Aubert aux policiers et au journaliste est donc faux. Et donc les Aubert n'ont pas pu voir la gamine descendre, ils ont vu Ranucci courir et poursuivre la gamine. Mais dans ce cas, ils n'ont pas vu la gamine.
Donc nous avons le choix suivant (rayez la mention inutile) :
- soit on colle aux constatations qui indiquent que la gamine s'enfuyait et qu'elle a ainsi perdu sa chaussure, ce qui explique qu'elle a pu être rattrapée.
- Soit on suit les aveux dans lequel Ranucci explique que "comme la portière conducteur était bloquée à la suite de l'accident, j'ai ouvert la portière côté passager. J'ai laissé descendre la petite fille et je l'ai suivie."
- Soit on suit la version de Mme Aubert au journaliste le 5 : Ranucci est passé par le toit, ou bien il a cassé la vitre, ou bien la portière conducteur s'est miraculeusement ouverte et il s'est précipité pour arracher la gamine de la voiture. Quelle agilité : on remarquera que selon l'accusation, il a même eu le temps avant de s'enfuir de fermer la portière !
- Soit on suit la version de M. et Mme Aubert à l'évêché : Après être passé par le toit de la voiture sans doute, ou alors avoir miraculeusement ouvert la portière bloquée, Ranucci a fait descendre doucement la gamine qui l'a suivi en lui demandant simplement : ou va-t-on ? Il a refermé tout aussi délicatement la portière passager, !ais les Aubert qui possèdent un veau ne sont arrivés que quand il avait disparu dans les fourrés.
- Soit on suit la version de M. Aubert trente ans après : cette fois, ils ont carrément vu Ranucci faire le tour de la voiture et dans ces conditions, ils ont eu le temps de l'arrêter et la petite fille a pu leur demander du secours.
Ah pardon, la fin, c'est la logique que je tentais de déduire, mais qui ne s'est en fait pas produite par suite d'une interruption de programme indépendante de notre volonté.
C'est formidable quand même une enquête comme celle-là, au moins on a le choix au montage.
Tout cela ne fait pas très sérieux. Le principe qui gouverne cette accusation depuis trente ans : plus on cherche à prouver, plus on trouve de paradoxes. Ils n'ont vraiment pas de chance.
Finalement la version des gendarmes me semble la moins paradoxale : on est arrivé : la voiture était arrêtée, on a vu un type s'enfuir sur le talus en portant un paquet assez volumineux. On s'est arrêté, on s'est approché : on a hélé le type, il n'a pas répondu. On n'a entendu aucun bruit, on a constaté qu'il n'y avait personne dans le véhicule, on a relevé le numéro minéralogique et on est reparti.
Là si j'ose dire, ça tient la route, et ça correspond au fait que la gamine est déjà morte quand ils arrivent. Or compte tenu du timing de l'enlèvement, à 11h45, je ne donne déjà pas cher de sa peau, pour dire à 12h15...
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