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On n'a pas à prouver l'innocence de CR, puisque, faute d'avoir pu établir sa culpabilité objectivement, le doûte doit lui profiter.
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Soit on prouve de façon incontestable qu'il est coupable, soit on doit le réhabiliter...
c est une lancinante question : la justice doit-elle éviter de laisser passer aucun criminel entre ses mailles, au risque de récidives révoltantes, ou ne doit-elle condamner aucun innocent?
Elle en laisse passer un certain nombre, il faut reconnaître, et non des moindres. Et cela ne choque pas beaucoup.
La réponse est constitutionnellement qu'elle ne doit pas condamner d'innocents. C'est l'un des principes de base de l'état de droit, ce qu'on appelle la présomption d'innocence. Dans les principes on ne condamne pas sur un doute.
La récidive n'a rien à voir, c'est tout confondre.
Par définition ne peut récidiver que quelqu'un qui est déjà condamné, donc reconnu coupable des faits dont il a été accusé. Quelqu'un qui a été innocenté dans une affaire ne sera pas en état de récidive dans une autre.
La récidive n'est révoltante que dans la mesure où elle témoigne de l'échec de l'administration judiciaire. Comme dans le cas Ranucci où il est possible que l'enlèvement de Ludovic Janvier soit le fait de l'homme au pull rouge.
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Car la certitude de jugement à 100% dont tu parles est évidemmment imaginaire dans la pratique pour bien des cas. Alors on relache tout ceux dont la culpabilité n'est pas "matériellement prouvée" comme tu dis? où s'arrête cette certification?
Ce qu'on appelle en droit un faisceau de présomptions concordantes. On n'exige pas une preuve, puisque l'on condamne sur "l'intime conviction", ce qui est une aberration du droit français qui confond en matière de crime : la déclaration de culpabilité qui ne peut se fonder que sur le raisonnement éclairé et le quantum de la peine qui effectivement fera appel à l'intime conviction. Comment juger d'un quantum sur des bases objectives ? Cela ne se peut pas. Il en va tout autrement de la déclaration de culpabilité.
Pour exemple Ranucci a été condamné non pas sur une preuve, il n'y en avait pas, mais sur un faisceau de présomptions qu'on a jugé concordantes : le couteau qu'il aurait caché et dont il aurait indiqué l'emplacement (les jurés ne connaissaient pas les circonstances rocambolesques de cette découverte), on a dit "une preuve parfaite" mais pour moi c'est une présomption car la preuve consisterait par exemple dans le bon d'achat dudit couteau, or on ne l'a pas, le pantalon taché de sang, ce serait une preuve si il apparaissait un élément qui démontre sans l'ombre d'un doute qu'il le portait effectivement à ce moment là, ce qui n'est pas le cas, ses aveux, encore une présomption, le témoignage Aubert, encore une présomption, pas une preuve, et le fait qu'il se trouvait sur les lieux à ce moment là, encore une présomption.
Il a été condamné sur un faisceau "concordant" de présomptions. C'est le droit français. Certains avocats généraux vont plus loin, ainsi dans l'affaire du médecin Daniel Fouchart, l'avocat général a-t-il déclaré : pour condamner il faut des preuves et je n'en ai aucune.
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Il s'agit d' un type de fonctionnement, qui, selon les époques, rigides ou libérales, ira de l'un à l'autre.
La seconde solution est certes la plus attirante, la plus tranquille pour la conscience mais globalement plus risquée que la première en termes même d'injustice, si l'on n'oublie pas de considérer que la crime initial est une injustice... mais cette première laisse planer le doute, voire le remords... alors que décider? et là, je reviens à mon point de départ : c'est la nécessité qui décide; l'époque : n'oubliez jamais que la justice est une fonction dans la société.
Le crime ne peut pas être considéré seulement comme une "injustice", ce n'est pas totalement exact ce que vous nous dites là, mais aussi comme un acte qui fait grief à la société. C'est ce qui fait la différence entre le civil : on répare un grief fait à une personne privée, là on peut parler d'injustice : on avait signé un contrat et il oublie de me payer..., et le pénal : on répare un grief fait à la société toute entière : vous avez commis un vol, c'est non seulement à la victime que vous vous en êtes pris, mais aussi à la société.
Je ne crois pas que condamner la mauvaise personne puisse réparer une injustice, au contraire cela l'aggrave, c'est peut-être ce qu'a tenté de nous dire Jean Rambla d'ailleurs.
Ce ne peut pas être la nécessité qui décide, sinon il s'agit comme dans l'affaire Ranucci d'un acte de Barbarie. On condamne Slansky parce que c'est une nécessité politique de la Tchécoslovaquie à cette époque, on condamne Ranucci parce qu'il faut bien quelqu'un pour expier, notamment le crime d'un autre et qu'il est nécessaire que la société se gave d'un peu de sang. La nécessité est une notion dangereuse qui invoque la raison de l'état sinon la raison d'état. Ce ne sont pas des méthodes. Cela s'appelle du lynchage. Nous n'avons pas la même vision de la société je pense.
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Ce qui vous choque aujourd'hui dans votre personne, aurait choqué tout autant dans leur coeur les habitants de la cité Sainte-Agnès si Ranucci avait été acquitté. En quoi, votre avis a-t-il plus de valeur que le leur?
ceci étant dit, je n'ai pas pris position mais essayé de comprendre au delà de vos "évidences".
Notre avis a plus de valeur parce que nous avons le recul qu'ils n'avaient pas. Que peut-on penser aujourd"hui des gens qui venaient hurler leur haine sous les fenêtres du palais de justice en 1976 ? Que ce sont des barbares qui ne réfléchissent pas beaucoup au sens même de la vie humaine.
Ce qui a choqué en 1978, c'est qu'on ait pu tuer un homme sur une accusation aussi fragile, le choc de l'acquittement n'aurait duré que quelques jours, cf Richard Roman, ou quelques mois. Le choc de la mort d'un homme qui peut-être était innocent choque encore, trente ans après.