Entretien: Gérard BOULADOU
Dernière mise à jour: 04 Mars 2007

 

 

 


 

46- Comment le jour de la reconstitution la juge a t elle pu estimer que Ranucci montrait l'endroit exact ou avait été retrouvé le couteau ? (cet endroit était-il matérialisé ?)

D’après les photographies de la reconstitution, l’endroit était matérialisé par un piquet mais qui ne dépassait pas ostensiblement. Lorsque Mlle Di Marino demande à Ranucci où il a caché le couteau, celui-ci, qui est assez loin de cet endroit, se dirige tout de suite vers lui, sans hésiter et montre l’emplacement avec le piquet qu’il n’a découvert qu’au dernier moment.

47- Ne pensez-vous pas que l’enlèvement du Pradet, le jour où Maître Lombard est à l’Elysée ressemblait à une provocation ?

Pour moi, il ne s’agit que d’une coïncidence. Il se trouve qu’un prédateur a agi ce jour-là. S’il l’a fait en pensant que Lombard était à l’Elysée, il était bien renseigné (qui savait que Lombard montait voir Giscard ce jour-là ?) et tordu pour faire une chose pareille. (Influer sur la condamnation à mort d’un innocent, dans l’hypothèse de la personne qui m’a posé la question)

48- Que pensez vous de la disparition de toutes traces de cette affaire Vincent Gallardo et est-ce que vous affirmez qu'elle est sans lien avec l'affaire de 1974? 

Dès l’instant que Ranucci est coupable, quel lien voulez-vous trouver entre les deux affaires. Le seul lien, c’est qu’il s’agit de deux affaires sordides d’enlèvement et de meurtre d’enfants. La voiture ne correspondait pas. Dans l’affaire du Pradet on recherchait une Renault 17 ou une Alpine bleu métallisé. Vincent Gallardo a été retrouvé noyé et non pas tué à coups de couteau. Il n’y a aucune possibilité de faire un lien entre les deux affaires. Pouvez vous faire un lien entre l’affaire de Patrick Henry et l’affaire Ranucci ? L’affaire Patrick Henry était-elle une provocation, sachant qu’on allait juger Ranucci peu de temps après ?Je ne comprends pas la question sur la disparition des traces de l’affaire Gallardo. L’enquête a été très importante mais n’a pas permis de trouver l’auteur de l’enlèvement et du crime. Le dossier a donc été classé au bout de 10 ans après la fin du dernier acte d’acte, c'est-à-dire lorsque la prescription est arrivée. Et le dossier est classé normalement là où il doit l’être. L’expression : « disparition de toutes traces » n’a aucun sens.

49- Quelle enquête a été faite dans l'entreprise (champignonnière) pour expliquer la présence du pull rouge?...et question plus "particulière" : pouvez vous préciser les relations entre M. Guazzone et la maréchaussée? 

L’enquête sur le pull-over n’a pas été fouillée. M. Guazzone a dit (mais cela n’a pas été noté et je le regrette) qu’il ne connaissait pas le possesseur de ce pull-over et il a lui-même enquêté, en vain, pour savoir s’il appartenait à quelqu’un qu’il connaissait. Quant aux relations de M. Guazzone avec la maréchaussée, il les a expliquées dans l’interview qu’il m’a accordée. Voici ce qu’il m’a raconté et qui figure à la fin de mon livre : « Et les gendarmes, je les connaissais parce que, quand vous avez des ouvriers, vous avez toujours une vingtaine de véhicules, et j’avais toujours les gendarmes pour une affaire ou une autre. Ou pour me conseiller ou pour me demander des renseignements. Quand mes ouvriers étaient des étrangers, je leur portais les papiers, on était obligé, et les gendarmes, je les voyais souvent. Et puis, il y avait des gendarmes qui avaient fait la guerre, et moi aussi. Et puis, je ne sais pas pourquoi, en 1950-1955, on m’a mis gendarme de réserve. Là, on a fait une enquête dans mon village. J’habitais à cinquante kilomètres de mon village natal. C’est une enquête qui a duré deux ans et mon père m’a dit : « Mais, qu’est-ce que tu as fait pour que les gendarmes fassent des enquêtes sur toi ? » Autre que des enquêtes ! Ils m’ont quand même collé quinze jours de période militaire. Ils venaient me voir de temps en temps. Alors, j’ai décidé d’aller voir les gendarmes pour leur parler du gars qui s’était embourbé dans la champignonnière. (…) Même pas vingt-quatre heures après, retrouver le bonhomme ! Quand ils ont cherché la petite, ils ont bien fait les choses, il y avait une centaine d’hommes qui patrouillaient dans tout le secteur. »

50- Avez vous le sentiment d'avoir personnellement mené une enquête à charge et à décharge ?

J’ai rencontré toutes les personnes que j’ai pu rencontrer. Je les ai enregistrées et j’ai traduit fidèlement leurs propos, ce que me reprochent certains et ce qui leur pose problème puisque lorsque ces personnes ont fait une erreur, ils oublient ce qu’elles disent ensuite qui montre qu’elles viennent de se tromper. Je fais bien sûr allusion au pull-over et au couteau lorsque le gendarme qui a pris la plainte de M. Martinez en parle. Ils oublient que ce gendarme me dit que le couteau a été trouvé sur les indications de Ranucci. Donc il se trompe dans la chronologie des découvertes.
A aucun moment je n’ai rencontré une personne qui amenait un élément susceptible de faire douter. 
Je regrette que Moussy n’ait pas voulu me parler. Il doit avoir des choses intéressantes à dire. Mais je n’en ai pas fini avec lui. Il aurait vu Ranucci vers 20 heures 30. Or Ranucci raconte lui-même qu’il n’était à Marseille qu’à partir de 23 heures. Cela fait un gros décalage dans les deux déclarations.
Et les derniers contacts que j’ai eus apportent de nouveaux éléments accablants contre Ranucci.

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