Le couteau
Dernière mise à jour: 21 septembre 2011

 

 
 

19 heures 25


Découverte du couteau...

Le capitaine Gras consignera dans le procès-verbal de constatation du 7 juin 1974:


Situation des lieux: Le lieu est situé en bordure du chemin conduisant à la champignonnière et à 100 mètres de l'entrée.

Description des lieux: Il s'agit d'un terre-plein recouvert de fumier en tas. Ce fumier en partie séché est assez dur. Sa répartition sur le sol ressemble à un croissant dont les deux branches se trouvent à l'est et à l'ouest et l'ouverture entre les extrémités au nord. Au centre de ce croissant une mare de purin stagne.
Au-delà de la partie est de ce croissant se trouvent de la brousaille, des arbres. La partie ouest du croissant est limitée par le chemin de terre conduisant à la champignonnière.

Recherches et découverte du couteau: le 6 juin 1974, suivant les instructions reçues, nous recherchons le couteau ayant servi à Ranucci pour perpétrer son crime.

A l'aide d'un appareil de détection électromagnétique nous décelons un objet métallique dans la partie nord-est de la partie est du tas de fumier. A cet endroit précis le fumier est dur. Avec précaution et après avoir creusé sur 20 cm de profondeur, nous découvrons l'extrémité métallique arrière d'un manche de couteau dont la lame est rentrée dans le dit manche. Ce couteau est fiché perpendiculairement par rapport au plan formé par la surface du tas de fumier.

Nous situons l'endroit à 18,20 mètres du mur nord-est d'une construction en agglomérés et à 19,70 mètres du coin sud-est alors que 10,75 mètres séparent ce couteau du prolongement du mur ouest de ladite construction.

Dès ces opérations terminées à l'aide d'une pince fine, nous retirons ce couteau du fumier avec une difficulté certaine. A l'aide d'une loupe nous examinons attentivement ce couteau. Aucune empreinte n'est découverte sur le manche et ce, vraissemblablement, en raison du frottement lors de la pénétration dans le fumier et également en raison de l'humidité. Nous actionnons avec précaution le système d'ouverture de la lame. Celle-ci sort et nous constatons qu'en outre les débris de fumier des taches de sang sont visibles sur la lame.

Ce couteau mesure: fermé: 12,5 cm - ouvert: 22 cm."
"Ce couteau est saisi et placé sous scellé découvert n°8. Il sera remis à Mlle le juge d'instruction.

Tous les scellés ont été remis suivants bordereaux d'envoi n°226/2.R et 227/2.R aux services du SRPJ sûreté urbaine de Marseille.

Fait et clos à Aubagne, le 8 juin 1974.


Comment expliquer qu'il faudra 1 heure 55 minutes aux gendarmes pour retrouver le couteau alors que Marseille disposait de toutes les informations sur sa situation et que les gendarmes présents sur les lieux étaient en liaison permanente avec l'hôtel de police?

Henri Guazzone, le contremaître de la champignonnière, qui avait suivi du début à la fin la recherche du couteau, a assuré que le capitaine Gras ne cessait de demander à Marseille: "Alors où il est exactement, ce couteau?".

Le Capitaine Gras répondit à Gilles Perrault, qui l'interrogeait sur le temps passé à rechercher le couteau:

" Est-ce que vous me prendriez par hasard pour un imbécile? Vous croyez vraiment que j'aurais perdu 2 heures à traîner dans les bois si l'on m'avait dit que le couteau était dans le tas de fumier? Pas du tout. Marseille m'a simplement dit: "Le crime a eu lieu dans le secteur et le couteau ne doit pas être loin: cherchez-le!".

Il donnera également l'explication suivante:
"On a commencé par chercher dans les bois, tout autour. Là, c'était facile parce qu'il n'y avait en terre aucun objet métallique. On a remonté tout le long du chemin et on a fini par le tas de fumier. Là, il y avait toutes sortes de saloperies en métal, notamment des boîtes de conserve."




Revenons sur les aveux de Christian Ranucci. Il affirme avoir jeté le couteau à terre et donné un coup de pied pour l'enfoncer dans le fumier.

Les gendarmes ont dû creuser sur 20 centimètres de profondeur pour le retrouver.


Où fut retrouvé le couteau?

Pour comprendre l'impossibilité du geste, il est essentiel de visualiser le tas de fumier. Celui-ci forme un talus précédant des broussailles et des arbres. Le couteau a été enfoncé perpendiculairement à la pente du talus et non, comme on pourrait le penser, suivant un axe haut-bas sur une surface horizontale.


Il n'a donc pas été, comme le dit Christian Ranucci, jeté à terre.

D'autre part, selon les gendarmes, le fumier, à cet endroit, était dur. Le couteau a, en outre, été enfoncé lame rentrée, offrant ainsi une résistance maximale à sa pénétration.

Le scénario décrit dans les aveux semble, par conséquent, invraissemblable et irréaliste car, au vu de tous ces éléments, on ne pouvait, d'un simple coup de pied, enfoncer le couteau sur une profondeur de 20 centimètres.

De plus, les aveux précisent que le tas de tourbe contenant le couteau longe
la piste menant à la galerie. Faux. Il est situé de l'autre côté de la place, à l'opposé de la dite piste.

Les aveux sont donc, sur ce point, infirmés par les constatations de la gendarmerie.

Tout ceci importait peu pour les enquêteurs. L'essentiel avait été d'obtenir des aveux, crédibles ou non.

Ainsi, dans son rapport de synthèse du 6 juin 1974 adressé au commissaire central adjoint, chef de la sûreté urbaine de Marseille, le commissaire Alessandra écrivait:


...Ranucci devait enfin préciser qu'il s'était "débarrassé" du couteau ensanglanté en l'enfouissant avec le pied dans le terrain marécageux de la champignonnière.
Il est à noter que le couteau a été retrouvé par les gendarmes, dans la soirée du 6 juin 1974, grâce aux indications précises fournies par l'intéressé.




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