Le couteau
Dernière mise à jour: 21 septembre 2011

 

 



20 heures


L'adjudant Monnin, commandant la brigade de recherches de la compagnie d'Aubagne, rédige le procès-verbal de saisie suivant:


Vu l'enquête ouverte sur la découverte du cadavre de l'enfant Rambla, Marie-Dolorès,
Vu la réquisition de Monsieur le commissaire principal Alessandra, chef de la sûreté urbaine de Marseille, agissant lui-même sur commission rogatoire de Mlle Di Marino, juge d'instruction à Marseille, suite aux aveux de Ranucci Christian, sur la commission du meurtre,

A dix sept heures trente minutes, nous nous transportons sur un terre-plein précédant l'accès à la champignonnière où à l'aide d'un appareil de détection électro-magnétique nous effectuons des recherches aux fins de découvrir un couteau ayant servi à Ranucci pour commettre son crime.

Après plusieurs recherches, nous découvrons ce couteau enfoui dans du fumier et sous 20 centimètres d'épaisseur, dans la partie nord-est du tas de ce fumier.

Nous saisissons ce couteau que nous plaçons sous scellé n° 8 et nous en portons mention à l'inventaire des pièces à conviction.

Ce couteau de marque "Virginia-Inox" à cran d'arrêt, manche en nacre, longueur fermé, 12,5 centimètres, longueur ouvert, 22 centimètres, sera remis à la disposition de Mlle le juge d'instruction.

Ce couteau placé sous scellé est remis le 7 juin 1974 au commissaire Alessandra suivant bordereau d'envoi n° 227/2.R.


L'adjudant de gendarmerie saisit officiellement le couteau à cran d'arrêt qu'il place aussitôt sous scellé, conformément à l'article 97 du Code de procédure pénale qui stipule que "tous objets et documents saisis sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés".
Le couteau sera remis au commissaire Alessandra le lendemain 7 juin.

On peut dès lors s'interroger, une nouvelle fois, sur le procès-verbal de l'inspecteur Porte qui déclarait "saisir pour être placé sous scellé" le même objet que celui visé ci-dessus.

Pourquoi l'inspecteur divisionnaire affirmait-il saisir un couteau qu'il n'avait pas saisi lui-même puis le placer sous scellé, alors que l'adjudant Monnin l'avait déjà fait?

Les deux officiers de police judiciaire parlaient-ils d'un seul et même couteau ou évoquaient-ils deux lames de même marque, de même caractéristiques, mais deux lames bien différentes?
La question peut se poser car l'inspecteur Porte n'avait, dans le cas contraire, aucune raison d'ajouter la mention relative au couteau à cran d'arrêt sur son procès-verbal.



7 juin


Le second interrogatoire de Christian Ranucci devant le juge d'instruction est consacré, pour partie, au couteau:


Nous présentons à l'inculpé un couteau à cran d'arrêt à ouverture automatique avec manche de nacre.

L'inculpé: Ce couteau m'appartient, je le reconnais. C'est le couteau dont je me suis servi pour frapper la fillette. Comme je vous l'avais déjà déclaré, je m'étais débarrassé de ce couteau après les faits en le jetant dans la tourbe près de la galerie où je m'étais rendu après les faits. Comme je vous l'ai déjà déclaré, j'avais enfoncé ce couteau dans la tourbe en lui donnant un coup de pied. J'ignore à quelle profondeur j'avais enfoui ce couteau. Je reconnais que la lame de ce couteau présente de légères taches brunes, il est possible que ces légères traces brunes soient des traces de sang provenant du cou de la fillette que j'ai frappé avec le couteau. Vous me demandez si j'ai essuyé le couteau après les faits, je n'en sais plus rien, il est possible que j'ai essuyé le couteau en le plongeant dans la tourbe, mais les choses se confondent dans mon esprit.

Le juge: Nous précisons à l'inculpé que nous transmettons ce couteau dans les services spécialisés aux fins d'examens de laboratoire.

L'inculpé: Je prends acte de ce que vous m'indiquez.

L'inculpé: ... Vous me faites remarquer que, outre le couteau automatique que vous venez de me présenter au début de cet interrogatoire j'avais dans ma voiture, dans le coffre, un autre couteau de marque Opinel, je réponds à votre remarque que le couteau Opinel avait été mis dans ma voiture en qualité d'outil et au même titre que les autres outils. Par contre le couteau automatique que vous m'avez présenté au début de l'interrogatoire se trouvait lui, dans ma poche car étant parti en week-end je comptais m'en servir au cours d'un éventuel pique-nique.


Christian Ranucci réitère donc le scénario de l'enfouissement du couteau décrit dans ses aveux.

Il ajoute cependant l'avoir jeté "dans la tourbe près de la galerie". Or l'endroit où fut retrouvé le couteau est situé à 100 mètres de l'entrée de la champignonnière. La proximité avec la galerie est par conséquent moins immédiate que l'expression "près de" laisse sous-entendre. Détail certes, mais néanmoins important si l'on essaie de reconstituer le fil des évènements à cet endroit.

La question du juge d'instruction sur l'essuyage du couteau est intéressante. Car elle pourrait laisser penser que le magistrat restait dubitatif sur la légèreté des taches relevées sur la lame au regard des quinze coups portés à la victime.

Cet interrogatoire semble en tout cas confirmer que Christian Ranucci n'a pu confondre l'Opinel et le couteau à cran d'arrêt puisque celui-ci lui a bien été présenté lors de cette comparution.




17 juillet


L'inspecteur Jules Porte rédige un procès-verbal de mise sous scellés pour l'ensemble des objets saisis précédemment.

Une mention supplémentaire et séparée précise que "les objets saisis et mis sous scellés à nous remis par la compagnie de gendarmerie, brigade de recherches d'Aubagne", parmi lesquels le couteau à cran d'arrêt, sont déposés au greffe du Tribunal de Grande Instance de Marseille.
Celui-ci établit un récipissé de dépôt des scellés, sous le n° 979, le 26 juillet 1974.




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