Le
couteau, retrouvé dans le tas de tourbe,
constituait l'un des éléments
clés de la culpabilité de Christian
Ranucci, parce que c'est ce dernier qui avait indiqué l'endroit
où il l'avait caché.
Christian
Ranucci a toujours reconnu la propriété de
ce couteau (sauf lors du procès, où il
lança au
président de la cour d'assises un péremptoire
et inutile "négatif").
Et
pourtant, le doute est bien permis.
Ses aveux, tout d'abord, contredisent totalement
les constatations des gendarmes ayant découvert
le couteau.
Que penser
ensuite des contradictions qui entourent
les différents procès-verbaux,
sinon un profond et lancinant malaise?
Le
couteau était-il bien en possession des
enquêteurs avant le début officiel
de ses recherches? Si oui, cela implique que celui
retrouvé dans la tourbe n'est pas l'arme
du crime et que par conséquent la culpabilité de
Christian Ranucci peut être remise en cause.
Cela implique également qu'il y avait deux
couteaux, dont l'un devant appartenir à un
autre homme, peut-être l'homme au pull-over
rouge...
Dans
le cas contraire, on reste stupéfait devant
la légèreté des enquêteurs
dans la rédaction des différents
procès-verbaux, documents pourtant officiels
et essentiels d' une procédure criminelle
pouvant mener un homme à l'échafaud.
Et
cependant il faut croire que rien n'est anormal
dans ces incohérences chronologiques. Ce
fut en tout cas l'avis de la Commission de révision
des condamnations pénales, qui rejetta,
le 29 novembre 1991, la troisième requête
en révision du 19 mars 1990, et dont les
conclusions à propos du couteau furent les
suivantes:
Attendu
que les contradictions qui existeraient entre
d'une part, les procès-verbaux des
services de gendarmerie de Gréasque
ayant procédé, sur place, à la
saisie du couteau le 6 juin 1974 à 19h25
et, d'autre part, les procès-verbaux
des services de police de Marseille, dressés
lors de la réception des diverses
pièces à conviction - contradictions
qui démontreraient que les services
de gendarmerie étaient déjà en
possession du couteau lorsque Ranucci a indiqué l'endroit
où il avait été enterré -
ne sont pas établies;
qu'en effet
le procès-verbal de réception
de pièces, daté, en première
page, du 6 juin à 17h30, est rédigé en
deux parties dont la seconde n'est pas datée;
qu'il
ne résulte pas de cette rédaction
que les objets mentionnés dans la
seconde partie du procès-verbal et
au nombre desquels se trouve le couteau,
aient été reçus par
les services de police dès le 6 juin à 17h30;
qu'en
revanche tous les procès-verbaux
des gendarmes concordent quant à la
date et à l'heure de la découverte
du couteau: soit le 6 juin à 19h25;
qu'en
outre, et même après être
revenu sur ses aveux, Ranucci a toujours
reconnu avoir indiqué aux enquêteurs
l'endroit où il avait caché le
couteau lui appartenant.
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Il
n'en demeure pas moins que des questions, essentielles
pour entériner définitivement la
culpabilité ou établir l'innocence
de Christian Ranucci, restent aujourd'hui sans
réponse:
Pourquoi
n'a-t-on pas emmené Christian Ranucci sur
les lieux pour vérifier ces aveux quant à l'enfouissement
du couteau?
Pourquoi les policiers n'ont-ils jamais enquêté
sur l'origine de ce couteau?
Pourquoi les experts n'ont-ils procédé à aucune
analyse des taches de coloration brun clair censées être
des taches de sang?
Pourquoi surtout ces mêmes experts n'ont-ils jamais vérifié si
les
blessures mortelles relevées sur le corps de la malheureuse victime avaient
bien été faites par ce même couteau?
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