Entretien: Gérard BOULADOU
Dernière mise à jour: 04 Mars 2007

 

 

 


 

26- La place réservée aux entrevues dans votre premier livre est très importante. Certains ont soulevé le fait que certains témoins n'aient pas été interviewés par vos soins ( ex: Mattéi...) et que par conséquent, vous auriez orienté les témoignages vers la culpabilité de Ranucci. Qu'auriez vous à leur répondre? Le fait que ces personnes n'aient pas été interrogées par vous est-il le résultat d'un choix volontaire ou la résultante d'un échec dans les rencontres ?

Faire une enquête 30 ans après les faits et alors que certaines personnes étaient déjà âgées au moment des faits n’a pas facilité les choses. Je n’ai pas retrouvé Madame Mattéi et je crois que cette dame est morte. Je peux me tromper bien sûr. Tout le monde croyait et moi-même que M. Aubert était mort. Et je l’ai trouvé en bonne santé. Mais Mme Mattéi était très malade au moment du procès et cela fait maintenant plus de 30 ans. J’ai recherché sa fille, pour l’instant en vain. Le capitaine Gras n’a pas répondu à ma lettre mais j’ignore si le gendarme d’Aubagne à qui je l’ai transmise la lui a fait passer. J’ai interviewé d’autres témoins (Jean Claude Jaglasse, Roger Arduin, Alain Barraco et de nombreuses autres personnes) mais un livre est limité, on ne peut pas tout mettre dedans. Le père de Ranucci est mort ainsi que Monsieur Martel. Si vous saviez le temps que j’ai passé à chercher M. Martel… Je suis allé dans la cité des Cerisiers. J’ai recherché le salon de coiffure où allait sa femme prés des Cerisiers alors qu’elle avait déménagé depuis six mois et j’ai laissé ma carte de visite à la patronne du salon. Sans résultat. Ce que je raconte dans mon livre ne représente peut être que le 10ème de ce que j’ai fait.
Monsieur Porte a toujours accepté de parler de cette affaire lorsque la justice le lui a demandé mais n’a pas voulu en reparler ensuite. Il est décédé au mois de décembre 2006.
Mlle Di Marino n’a pas répondu à la lettre que je lui avais envoyée il y’a longtemps. Je lui ai donc téléphoné et elle a refusé de me rencontrer et de me parler, mettant en avant son devoir de réserve. C’est ridicule car le devoir de réserve est levé lorsque la personne est à la retraite.

27- Certains estiment que vous "êtes en mission pour la grande maison"(sous-entendu évidemment pour la Police). Qu'avez vous à répondre à ces personnes ?

C’est une énorme bêtise, un procès d’intention. J’ai suffisamment expliqué mes motivations dans mon livre. Ces personnes qui crachent sans arrêt sur les policiers, les gendarmes, les magistrats, les jurés et pratiquement sur tout ce qui représente une autorité, oublient dans leur « folie » que je suis comme tout le monde. J’ai souffert par empathie en pensant à Ranucci devant la guillotine. Cette affaire m’a passionné. J’ai eu le tort au début de vouloir faire mon enquête à partir des éléments donnés dans le livre de Gilles Perrault. Et j’ai perdu des années car tout est faux. Il suffit de lire la procédure pour en être convaincu. Il y’avait des points qui ne collaient pas dans ce livre. Je me suis demandé comment des personnes qui, selon Perrault, n’avaient rien vu, pouvaient ensuite déclarer qu’ils avaient vu un enfant ou que les Aubert leur avaient parlé d’un enfant. Et que grâce à leur témoignage, on retrouvait le corps de l’enfant. Et la thèse de Perrault sur le vol de la voiture, du pantalon et la mise en scène du couteau était difficile à croire. En fait le romancier a fait ce qu’il reprochait aux policiers, beaucoup d’erreurs de date, incompréhension de la procédure judiciaire, etc.
Et c’est ce qui m’a motivé pour faire mon enquête.
Dire cela est aussi bête que dire que Perrault était en mission pour les avocats de Ranucci (c’est un ancien avocat) où que Gihel ou Jpasc95 sont en mission pour Gilles Perrault. Ces attaques ne me touchent pas. Elles proviennent d’ignorants revanchards qui n’ont pas encore compris les éléments du dossier. J’avoue que lorsque je lis sur le forum que des personnes qui s’intéressent depuis plusieurs années à cette affaire n’ont toujours pas compris ce que signifie la date du 5 juin 1974 sur la fiche de scellé ou que le couteau trouvé à 19 h 29 peut figurer sur une liste commencée à 17 heures 30, cela m’inspire, lorsque je voie ces personnes m’insulter, un certain mépris. Mais en fait, j’ai aussi envie de les remercier car elles me donnent la motivation pour aller plus loin dans cette enquête. Je suis certain, au vu de ce que je viens de découvrir et des pistes qui me restent à explorer, qu’elles seront obligées de reconnaître que j’avais raison.

28- Que vous a apporté votre travail sur l'affaire (financièrement et non financièrement) ?

L’enquête m’a coûté très cher mais quand on est passionné, on ne compte pas. J’ai séjourné à Paris, à Nice. Si vous voulez rester un moment avec un témoin, vous mangez avec lui et vous n’allez pas à la fin du repas lui demander de payer l’addition.
Il y’a ensuite des frais pour faire protéger le livre, faire de nombreuses copies pour solliciter les éditeurs. Tout cela coûte cher. Aujourd’hui, je dois avoir à peine remboursé les frais que j’ai eus. Et puis je vais en avoir d’autres.
Mon enquête m’a permis de rencontrer des gens très sympathiques avec qui je suis souvent en relation. Certains m’ont apporté des éléments que je n’avais pas (films, documents ou autres).
J’ai eu aussi des déconvenues : le refus de la cour d’Appel d’Aix en Provence de me laisser consulter le dossier (il a fallu que je me le procure par mes propres moyens), le refus de me laisser consulter le dossier à l’Evêché (il contient des documents de travail intéressants qui ne figurent pas dans la procédure) Mais je n’ai pas dit mon dernier mot dans ce domaine.

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