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On ne peut, me semble-t-il, expliquer de manière
rationnelle la scène décrite par les Aubert qu'en
y intégrant la piste du chien, dont vous avez, le premier,
révélé l'importance. Quelle lecture en
faites-vous?
On
retrouve, dans la champignonnière, un pull-over
rouge dont on sait qu'il n'appartenait pas à Christian
Ranucci. On le fait flairer à un chien policier;
celui-ci remonte le chemin de terre puis la rn8bis jusqu'à trente
mètres de l'endroit où le corps a été retrouvé,
probablement l'endroit où se trouvait la voiture.
Tout ceci implique que le pull-over est indubitablement
lié à la scène du crime.
Reste à préciser quand ce vêtement a été déposé dans
la galerie. Les maîtres-chiens que j'ai interrogés
ont été formels: un chien ne peut pas suivre
une piste 48 heures après, ce qui avait été dit
lors de la conférence de presse du garde des sceaux
Alain Peyrefitte. C'est donc que le pull-over aurait été déposé le
3 en fin de journée, voire le lendemain.
Se pose alors évidemment la question du jour et de
l'heure de la mort de la petite fille. C'est d'ailleurs Michel
Drach qui a révélé, lors de la préparation
de son film, l'absence de cette information dans le rapport
d'autopsie. Personne, avant lui, ne s'en était aperçu.
Les médecins légistes ont pourtant bien prélevé le
bol alimentaire. Or, selon l'avis d'autres légistes
que j'ai pu rencontrer, ce prélèvement fait
toujours l'objet d'une analyse. On peut donc en conclure
que celle-ci a bien été faite et que ses résultats
contredisaient le version de l'accusation.
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Pour en revenir à la piste du chien, pourquoi
celui-ci n'a-t-il pas remonté le talus pour aller au
cadavre?
Je l'ignore. A mon avis, l'homme au
pull-over rouge s'est débarrassé du vêtement dans
la champignonnière car il devait se douter qu'on l'avait
identifié lors de ses tentatives précédentes
dans les autres cités; il est ensuite remonté dans
sa voiture, sans retourner au talus. Je pense que cela a été son
dernier trajet.
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Le commissaire Alessandra a-t-il évoqué l'opération
du chien policier?
Non, mais il m'a dit ce que je rapportais
dans mon livre, à savoir qu'il était convaincu
que Christian Ranucci et l'homme au pull-over rouge s'étaient
rencontrés au cours de la nuit dans le quartier de
l'Opéra à Marseille. C'est tout ce qu'il a
consenti à me dire.
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Faisait-il le même lien avec les incidents des autres
cités?
Il ne m'en a pas parlé, bien
sûr. Et pourtant ce lien existait et il le savait,
sa hiérarchie le savait puisque Mr Cubaynes en avait
parlé dès le début de l'affaire, avalisant
ainsi le témoignage de ceux que l'on chercha à faire
passer pour des faux témoins. Mme Mattei, par exemple.
Jamais, dans le climat d'hystérie créé par
cette affaire, elle n'aurait pris le risque d'imaginer ce
qu'elle a rapporté. Et puis elle avait elle-même
des enfants et était très malade. En vérité Mme
Mattei fut surprise de voir Mme Mathon à l'entrée
des Baumettes car elle savait, comme les autres témoins
qui n'avaient pas reconnu Christian Ranucci, qu'il n'était
pas l'auteur des faits qui lui étaient reprochés.
C'est donc un mouvement de curiosité naturelle qui
l'a fait aller vers la mère de Christian.
A propos de tous ces incidents, je me suis longuement intérrogé sur
le mode opératoire utilisé par l'homme au pull-over
rouge. J'ai fini par me renseigner auprès des milieux
pédophiles. Je ne comprenais pas pourquoi cet individu
abordait toujours deux enfants en même temps. Je trouvais
que c'était très risqué. Et on m'a dit
le contraire. En effet les enfants, on les met en garde et
on leur déconseille de parler à un inconnu.
Quand ils sont seuls, ils ont peur et suivent les conseils
qu'on leur a donnés; mais quand ils sont deux, ils
sont rassurés et donc moins méfiants.